RANDONNEE LIBRE

1ère étape

Le problème avec les ânes, c'est qu'on ne sait jamais jusqu'où ils nous emmènent !

Au début ils furent un travail, puis il nous a pris l’envie de vivre avec eux et de redevenir paysans.
C’est ainsi qu’un jour nous avons pris la route en direction… de l’autre bout de la France…

 

ITINERAIRE

Avec un peu plus de détails :


…St Père en Retz … Touvois … Fontenay-le-Comte … Niort … GR36 … Aigre … Pranzac … Mareuil … Brantôme … Périgueux … LesEyzies … Gourdon … Souillac … St Céré … Montsalvy … Chaudes Aigues … Le Malzieu … St Alban sur Limagnole … Grandrieu … Langogne … Concouron … Privas … Crest …

soit près de 1000km !

 

ORGANISATION AVANT DEPART :


Nous avons commencé à en parler un an à l’avance. Lors d’une visite chez un ânier de la Drôme, nous nous sommes mis d’accord sur le point de chute. Ensuite nous avons tracer une ligne en fonction des contacts et amis que nous avions sur la route.

Pour les cartes et itinéraire : nous avons lancé un grand SOS sur Internet pour consulter ou acheter à moindre coût les 52 cartes IGN 1/25000 que nécessitait ce voyage. Cela à bien pris 3 mois pour centraliser assez d'informations et imaginer un passage à travers chemins et petites routes d'un bout à l'autre.


En randonnant, il faut se rendre compte que les cartes ne sont qu’une théorie c’est parfois alors la surprise ce qui vous fait relativer la trajectoire que vous imaginez sur la carte avant le départ avec un joli stabilo vert ! Bien souvent, sur le terrain nous nous sommes guidés à partir des hangars, plans d’eaux, calvaires ou autres repères stables figurés sur la carte. De plus, l’itinéraire envisagé au départ ne tient pas compte des rencontres qui peuvent modifier vos étapes, or c'est une belle part de votre randonnée !
Bien sûr, pour être tranquille vous pouvez vous mettre sur les rails d’un GR, mais en été la tranquillité sera relative. Alors avec 4 jeunes ânes à gérer nous avons principalement choisi une traversée hors des sentiers battus.

Point de vue équipement, que pourrions nous dire… à part le fait que nous étions finalement prêts le jour de l’arrivée ! Au début du projet nous avions prévu un bât de l’armée suisse dessoudé, allégé, mais une semaine avant le départ nous nous sommes inspirés de l’expérience de Norvégiens : un couple parti depuis 25 ans avec leurs ânes… sans bât ! Juste des sacs et des couvertures tenus par des sangles avec anneaux coulissant pour les serrer.
Alors nous avons transformé nos sacs en bât : cousus en pairs par un large tissu épais central, bricole à l’avant et avaloir à l’arrière, sous ventrière. Attention au point d’attache de la sous ventrière : en la fixant en bas des sacs nous avons vite compris qu'on écrasait le poids des sacs contre les flancs de notre âne, alors nous l'avons fixé en haut (sous le tissu central) pour qu'ils restent libres. Cela parait d'une évidence surtout quand on l'a déjà fait ! Nous avions de très bons tapis matelassé que nous sanglions. Après cette expérience nous pouvons comprendre qu’un bât est utile pour de lourdes charges ou sur un terrain de montagne, mais en situation de plaine et avec un poids relatif à un confort de randonnée, nos sacoches l'ont fait.
Pour les bricoles et avaloirs nous avons pris de la feutrine recouverte de peau de mouton, ce matériel n'a pas provoqué de brûlures aux frottements. Sur nos sacs nous avions posé des sangles réglables avec des rivets pop. Petite astuce pour que les rivets tiennent sur de la toile : mettre une rondelle de chaque côté pour rigidifier l’ensemble plus un tissu autour si vous croyez à la déchirure.
Pour le repos des ânes nous avions prévu piquets et fils pour fabriquer l'enclos du soir quand nous ne trouvions pas de champ clôturé.

Matériel de bât : 4 tapis doublés d’une serviette éponge (en prenant de bons tapis, on dorlote nos ânes et on se fait plaisir le soir !), 4 sacs à dos de l’armée rivetés par 2, 1 paire de sacoche en cuir, 1 paire de sacoche en toile, .
Pour les ânes : 1 étrille, 1 brosse, huile de laurier et foie de morue, cure pied, râpe, reinette, bâches de pluie pour nous et pour eux avec gros œillets, désinfectant (extrait de pépins de pamplemousse), eau physiologique, crème cicatrisante (crème à base de lavande et de souci), argile, teinture mère d’Arnica, 13 piquets en fibre de verre + 120m de cordelettes nylon, un seau en toile huilé pour boire.
Bricolage : Peson, sangles de rechange, rivets, boussole, piochette, fil de cuisine et aiguilles (grosses et petites), fil électrique, lacets. Il nous a manqué une bonne pince coupante pour les barbelés encombrants, rouillés, abandonnés au gré des chemins…
Cuisine : Réchaud gaz, « pot à mogettes » pour tout cuire et tout ranger, bols, assiettes et baguettes chinoises, cuillères à soupe chinoise (elles sont plus petites et existent en plastique), 2 thermos d’un litre, 2 torchons un pour le pain et pour la vaisselle, des sacs de toile pour mettre les légumes, le fromage et autre réserve de nourriture, 2 jerricans de 10l que nous transportions vides, 1 bassine, 1 savon.
Couchage : duvets, tente avec grande avancée, les tapis des ânes comme matelas, 1 couverture, 1 plaid.

Point de vue préparation à la marche … avant nos ânes vivaient dans leur famille d'origine : un troupeau de 18 grandes oreilles. Ils avaient l’habitude de fonctionner en groupe mais pas de le mener. Les 2 plus grands, pour la 1ère fois se sont retrouvés les aînés du troupeau. Nous les avons retirés de leur troupeau initial 7 mois avant le départ, ils avaient 6ans. 2 à 3 fois par semaine, nous faisions des petites sorties de 1 à 4 heures. Cajou s’est reposé sur Christophe, Amande sur Cajou, Pomme sur Amande et Quetsche du moment qu’on est là et qu’il y a à manger sur le chemin, tout va !

4 ânes pour 2 humains quand il y a pas mal de routes à traverser et qu’ils sont dans une phase d’apprentissage dans un nouvel environnement changeant constamment… il a fallu composer… nous avons fonctionné par binômes : Cajou et Quetsche avec Christophe, Amande et Pomme avec Nadège.

Nous avons adapté une longe pour tenir 2 ânes : une grande corde de 4m avec noeuds à chaque bout et 2 mousquetons coulissants. Nous tenions une seule corde en main pour 2 ânes. Ils pouvaient se mettre à la queue leu-leu grâce à la longueur de corde ou nous pouvions les ramener groupés en tête à tête en faisant coulisser la corde en cas de besoin. S’ils paniquaient nous pouvions ainsi les tenir proche et faire corps avec eux en les maintenant dans notre dos. Seul hic à cette technique : si l’un tombe dans un trou (comme cela nous est arrivé avec Amande !) ou s’ils se cassent en courant… ils sont 2 dans l'aventure ! Il faut donc réagir très vite et choisir à tout prix un mousqueton à attache rapide.

Tout l’hiver nous avons tenu leurs sabots impeccables car nous avions choisi de ne pas les ferrer pour cette marche estivale de 1000 bornes.

Au cours de notre parcours, nous avions 4 dates à respecter : le 19 avril, une fête nous attendait à Fontenay le Comte (85). Le 18 juin, il nous fallait être à Daglan (24) pour laisser les ânes à Nathalie et nous absenter une semaine pour les rencontres Médi’âne. Du 10 au 24 août, nous devions être à Paulhac en Margeride (48). Et enfin être au plus tard le 24 septembre à Crest pour accueillir un groupe d’adolescents autistes de Paris pour un séjour d’une semaine… Ce furent 4 RDV de trop car un RDV en randonnée cela conditionne vos déplacements et rythmes…

 

RANDONNEE


Départ le 11 mars sous la neige !

Ce qui fut assez exceptionnel pour la Loire Atlantique mais pourtant vrai la neige nous attendait au bourg de Chauvé ! Petite étape de 10km … ce qui s’avèrera finalement être notre moyenne de croisière (entre 10 et 12 km) du tourisme nous dirait notre ami Clouteau ! 1ère déconvenue : la tente neuve n’est pas étanche !

Heureusement nous avions prévu ce départ comme un pré-départ : 1ère étape 2 jours après avec une semaine de pause pour assurer la formation Médi’âne à Noirbreuil (44), revoir la tente et attendre que le temps devienne plus printanier. Nous sommes repartis le 24 mars pour nous rendre dans la forêt de Mervent près de Fontenay le Comte(85)… 3 semaines pour faire 175 km.

 

2ème étape : le 17 avril : attendus par des amis, une petite fête est la bienvenue !

Ces 3 premières semaines ont été belles mais hippiques pour des ânes : car si nous nous sommes dans l'élément que nous avons voulu (tout lâché et être sur les routes) les ânes eux ont eu des peurs paniques qui leur ont fait regretter leur marais : attaque de chiens en pleine nuit, poursuite de poneys mal clôturés, environnements inconnus (nuit en forêt), invasion de poux et de tics…
Nous avons pu remarquer depuis l'attaque des chiens, qu’Amande et Cajou passent leur nuit aux alentours de leur nouveau territoire et qu’ils s'allongent seulement quand nous nous levons au matin. Leur fatigue se fait donc ressentir. Une nuit en forêt de Mervent, nous avons du les tenir en ligne d’attache pour ne pas qu’ils paniquent à fendre l’air au moindre bruit de feuille …
De plus, près de leurs cousins les chevaux, il nous faut faire l’âne : nous arrêter, prendre le temps de regarder l'autre arriver en galopant et attendre d'être sûr que rien ne se passe pour continuer de longer la clôture mitoyenne. Alors pour habituer nos ânes à la compagnie des chevaux, nous nous sommes arrêtés 15 jours chez un ami qui a une jument Lola et un âne Pompon (20 ans, qui connaît son métier) et avons emmené les ânes un par un dans un centre équestre pour leur montrer que tous les chevaux ne courent pas derrière les ânes, dents en avant !

...

Impossible donc de savoir quand nous serons rendus à notre prochaine étape cela dépend d'eux et on n'a pas envie de les stresser plus qu'ils ne le sont. Il nous faut jeter la montre dans le puit et ne plus nous soucier de l'impératif « timing », pour nous concentrer sur le bien être de nos ânes et respecter leur rythme d'apprentissage de nomades. Il faut qu'ils puissent trouver du plaisir à cette aventure sinon cela n'a pas de sens…

Nous apprenons à ne rien fixer de trop précis, ni le jour, ni le rythme de notre déplacement et encore moins le temps clément que le ciel nous réserve, nous avons très vite abandonné les appels à la météo locale, ils nous sabraient nos journées de marche pour rien ! Donc nous faisons au rythme de la nature et laissons les nuages décider de notre avancée. Nous avons choisi de profiter des pauses autant que de notre marche et de nombreuses rencontres ont nourri ce périple.

Cette aventure nous demande de : toujours rebondir sur les déconvenues, imprévus ou surprises en tout genre, qu'elles soient bonnes ou mauvaises… toujours nous remettre au goût du jour et faire avec…remettre en question nos attentes et faire avec ce qui vient, trouver un rythme à notre déplacement et organiser le rangement des affaires : faire défaire et refaire !

1ère leçon : nous aurions dû préparer les ânes à randonner seul un par un, avec nous. D’une part pour qu’ils se confrontent seul à leurs peurs et d’autre part pour que le repère soit plus nous qu'un autre âne or cela c'est fait sur le tas au gré des Km et des difficultés partagées.

Question chemins : Le remembrement est une vraie m... ! Heureusement nous avons trouvé notre plaisir dans le bocage vendéen en découvrant des châtaigniers bicentenaires et en traversant la forêt de Mervent.

Les accueils formidables que nous rencontrons comblent l'illusion d'être parfois pris pour des fantômes errants ou de dangereux terroristes non conventionnels. Il nous faut là aussi revoir notre positionnement : notre projet était d'avancer de ferme en ferme et de nous y ravitailler… mais il semble que le supermarché à remplacer les jardins voir même les poulaillers... reste-t-il encore une dimension humaine au milieu de ces exploitations agricoles mécaniques ?

Le 17 mai :

Moins de Kilomètres parcourus dans cette étape qui nous a amené entre Deux Sèvres et Charente à Couture d’Argenson(79) à l'association Ânes et Mômes chez Bob et Maryse… seulement 80km en 3 semaines diront certains ! Et pourtant l'aventure commence à avoir du goût et à prendre forme.

En effet, les 1ères semaines quelques peu mouvementées ont laissé place à des ânes qui trouvent leurs rythmes et leurs repères dans ce que nous leur proposons. Alors un accord se forme et la bulle des 6 marcheurs marque son empreinte.

Nous sommes partis avec un sulky fait maison pour muscler Amande mais comme prévu il ne passe pas partout et en sous bois nous avons pu expérimenter quelques crevaisons : nous en comptions jusqu’à 3 par jour… alors nous le laissons là et repartons avec nos 4 ânes batés !

Nous avons pu faire des haltes qui ont donné sens à notre aventure :
• l'école de St Marc La Lande (79) a le bonheur d'être encore ouverte pour 2 classes de bambins. Pendant trois jours ils ont profité de la présence des ânes dans la cour de récré : au programme caresses, contact, brossage, marche libre et discussions ont ponctué une semaine exceptionnelle à l'école.
• le Foyer occupationnel de Chizé accueille 40 résidents et de nombreux animaux de ferme dont Justin, un âne de 25 ans. Quotidiennement ce sont certains résidents qui soignent et pansent. De notre passage, Danielle, René, Florence, Evelyne… garderont l'envie de marcher en compagnie des grandes oreilles. Pour vous donner une idée de ce que nous avons partagé, Evelyne a écrit un poème que nous vous laissons découvrir…

...

Côtés chemins, la Gâtine (autour de Parthenay) nous a gâté de ses 1ères courbes ombragées. Un délice de retrouver haies et petits prés fleuris le long de L'Autize. Si bien que pour traverser la plaine de Niort infestée de pesticides, engrais et fongicides en tout genre en ce joli mois de juin, nous avons pris une bétaillère sur 60 km pour nous retrouver pour notre plus grand bonheur dans la forêt d'Ensigné, d'Aulnay et de Chef Boutonne. 2 jours non stop en forêt à suivre sentiers de terre battue.

Le 17 juin :

Coté chemins : De Couture, nous avons traversé entre plaines et forêts pour arriver sur les bords de la Charente. Ensuite course d'orientation en forêt de la Braconne (tout à la boussole) et arrivée à Pranzac (près d'Angoulême). De là nous avons fait le choix d'avancer à la vitesse de la lumière car le temps nous pressait… une bétaillère nous a donc conduit à Milhac d'Auberoche, au sud-est de Périgueux. Nous avons alors suivi le GR 36… et tout de suite nous avons reconnu le bon pays touristique et l'intérêt du porte monnaie. Tout au long de notre traversée de la Dordogne nous avons observé avec amusement l'illusion du paraître. Heureusement que la natures y est belle, que les sentiers sont super entre coteaux et forêts et que quelques rencontres forts sympathiques ont mis de l'eau dans le vin. C'est encore les personnes les plus simples auprès desquelles nous avons eu le meilleur accueil.

Nous voici donc arrivés à Daglan pour le plus grand plaisir de nos ânes… depuis Couture d'Argenson nous avons parcouru 125 km à pied et 100 en bétaillère.

Depuis que nous avons lâché le sulky, nous avons réorganisé les sacs :
• Quetsche porte entre 5 et 7 kg : tenues de pluie pour nous et les sacs, fils de clôture, outillage.
• Pomme entre 12 et 15 kg : papiers, livres, chaussures, sangles de rechanges, seau et bassine.
• Amande entre 15 et 20 kg : vaisselle, nourriture, pharmacie.
• Cajou entre 22 et 25 kg : vêtements, affaires de toilette, duvets, tente (mise en tapis) et piquets.

Nous passons beaucoup de temps à les inspecter et à les papouiller. Entre les tics, les mouches plates qui se logent dans le pli des fesses (on nous a indiqué de badigeonner les fesses avec de l'huile), les moucherons qui irritent les oreilles et les attaques de moustiques aux abords des rivières, il y a de quoi passer sa soirée. Et les ânes se laissent faire, voir même ils viennent nous chercher. Les femelles réclament le brossage et se poussent pour en avoir le plus possible.

A passer notre vie ensemble et à être attentifs les uns aux autres la communication passe plus rapidement : un soir, dans un grand pré de 5 hectares, « voilà ti pas » nos ânes venir en courant se cacher près de la tente et Cajou d'aller et venir vers la direction où il a peur mais pas assez décidé pour s'en rapprocher. Très clairement il est venu à 2 reprises se placer derrière Christophe pour l'envoyer en éclaireur débusquer le renard caché dans la haie à 300 mètres de là… Cajou suivait l'action de quelques pas derrière.

Au niveau sabots tout va bien, ils poussent. On use sur le bitume mais la balance s'équilibre. Seule Amande a besoin qu'on revoit régulièrement ses aplombs. Pour cela nous avons heureusement emmener râpe et reinette. Pour la repousse des sabots nous utilisons de l'huile de foie de morue. C'est fort à l'odeur mais ils se laissent faire sans même lever les sabots. Inconvénient : l'huile ramollit la corne.

Les ânes vont de mieux en mieux. Ils acquièrent de nouveaux repères, n'ont plus les peurs du départ et commencent à apprécier toutes ses novelles fleurs.

Ah ! le campement, parlons-en ! Nous mettons autant de temps à ranger et à déballer (3 heures) qu'à marcher (4 heures). Et cela n'est pas qu'une question d'organisation. L'intendance pour 4 ânes c'est lourd et vite revenue. Il nous manque des piquets en tire bouchon à enfoncer au sol pour les attacher rapidement à la corde sans devoir attendre 4 arbres bienveillants pour le midi.

Le bilan a cette mi-étape est de 37 jours de marche pour 370 km donc une faible moyenne mais qui convient tout à fait au groupe et entre autre à la petite Quetsche de 2 ans. Même si maintenant elle suit bien Cajou, au bout de 2 heures de marche nous voyons son attention et sa concentration se porter bien plus sur la verdure environnante. Elle se met à papillonner, ne tient plus sa place et veut jouer en mordillant Cajou.

Le 17 juillet : Un virage sur la carte…

Nous avons touché le bas de notre diagonale courbe Sud-Est 120° et prendrons à partir de fin juin la direction plein Est pour une horizontale vers la Drôme. Un rythme s'est installé. A la voix les ânes reprennent maintenant leur place respective et comprennent la logique de l'alignement sur les routes par rapport aux chemins où nous les laissons plus libres. Il leur aura fallu du temps et de l'entraînement mais ils s'y sont mis et à notre plus grand plaisir nous apprennent à les regarder faire leurs expériences.

En repartant de Daglan fin juin nous pensions être serein, tranquillement installés dans un rythme et dans le plaisir d'enchaîner les heures de marches et les étapes, avec un équipement révisé et adapté au top à chacun… Bien mal nous en a pris …

Leçon 72427 : ne pas attacher nos ânes à une corde de 8m en territoire inconnu pendant qu'on fait la sieste !

Le 1er juillet, à 20km de Rocamadour après 3h de marche en plein cagnard on arrive sous d'adorables châtaigniers frais. Le terrain est trop dur pour y enfoncer nos piquets de clôtures nous attachons donc les 2 grands et laissons les 2 petites vagabonder autour de nous pour la pause repas. Le sommeil nous a tous pris. Tout le monde profitait de la sieste sauf un chien et oui encore un chien ! curieux de notre présence, il a fait irruption et a surpris nos ânes. Pomme la fugueuse a donné le signal, les 2 grands ont suivi mais rendu au bout de leur corde ils ont fait soleil ! Diagnostic : Cajou s'en est relevé surpris mais indemne tandis qu'Amande est restée sur le tapis avec une patte raide. Gloup ! Inutile de vous décrire notre dégoût et notre colère de nous-même. Le vétérinaire du coin est venu et l'a « shootée » à l'anti-inflammatoire en nous expliquant gentiment que si le lendemain les médocs faisaient effet c'était musculaire et donc repos de 3 semaines, sinon c'était articulaire et là c'était transport au cabinet, radio et ensuite à voir selon les dégâts d'une fracture éventuelle… regloup ! douce nuit que fut la notre …

Enfin tout cela apprend à se remettre en question, à ne pas se laisser aspirer par la fatigue, mais c'est souvent les ânes qui trinquent ! Heureusement 3 jours d’anti-inflammatoires ont fait effet ainsi que baume à l'arnica, emplâtre d'argile, placement d'aimants, mains de magnétiseur du coin… Nous avons repris progressivement la rééducation puis la marche 3 semaines après. Un grand merci à nos hôtes locaux qui nous ont recueillis et soutenus pendant cette convalescence et à Henri Gougaus pour sa lecture des "7plumes de l'aigle".

Déjà Henri avait accompagné notre randonnée dans ces débuts car nous étions passé par Pougne Herisson (85) nombril du monde et capitale du conte et un autre de ses romans : «par amour» avaient baigné notre coeur à notre départ.

Forts de cette expérience, nous sommes encore plus attentifs au présent et aux ressentis que nous donnent à vivre les choses vivantes qui nous entourent et nous habitent.

Puisque nous en sommes au moment lecture, j'ai aimé : «les voisins de l'horizon ».

Fin Août :

Entre les Margerides et l'Ardèche ... à 8 km de Coucouron ... Tout va bien !

Les ânes sont en pleine forme, tant physique que mentale. Amande a bien récupéré de son entorse et maintenant c'est elle qui mène dans les côtes ... et oui parce que depuis le Lot, nous montons et nous descendons :

- les gorges de la Truyère, un régal de verdure et de dénivelés (les ânes y ont gagné leur trophée de cross !).

- les forêts de la Margeride et ses myrtilles dont nous avons fait une cure à l'occasion d'une pause de 15 jours à Paulhac (si vous ne connaissez pas le Gévaudan, l'Auberge du Bon Accueil saura vous recevoir).

- au sud des gorges de l'Allier, nous serpentons dans d'agréables chemins de randonnées à la recherche de champignons. Dommage qu'il fasse si froid dans ce pays de Lozère, sinon on y serait presque bien !

Cette semaine nous grimpons au Mont Gerbier de Jonc faire notre pèlerinage auprès des eaux de la Loire.

Nous voilà habitués à notre condition de randonneurs itinérants avec 4 ânes. Fini les sursauts nocturnes d'attaques de chiens ou de fugue d'ânes ... car ils nous l'auront quand même fait de se tailler toute une nuit dans la pampa ! Alors reste le plaisir du temps qui passe, les paysages qui défilent sous les pas et les rencontres imprévues, mais toujours accueillantes que nous faisons presque chaque soir.

Merci à tous pour ce que vous nous avez donné sur notre passage.

Leçon 187 562 293 : ne pas s'endormir au volant ! Sur un petit sentier escarpé à flan de montagne, Amande (et oui encore elle !) a eu la bonne idée de jouer au cabri en grimpant sur une bordure de pierre pour éviter le ruissellement d'eau dans le sentier. Résultat : glissade, dérapage et chute sur le dos… 2 mètres plus bas… et on enchaîne : Kristof saute pour la remettre debout mais oublie qu'il mène aussi Cajou qui en le voyant sauter a fait ½ tour pour le suivre… Résultat : glissade, dérapage et chute ! 2 ânes et 1 bonhomme dans le trou ! Nous avons poussé fort pour les remonter et heureusement que la boue, la fougère, les sacs et les orties ont amorti les chocs. Heureusement aussi qu'ils ne portaient pas de bâts à croisillons… aucun dommage donc à signaler à part pour nous les bras gonflés d'orties : 3 nuits allongées dans la rosée !

Encore donc une leçon : ne jamais se précipiter même en mauvaise posture. Prendre le temps de souffler avant de réagir. Et oui ça semble évident à dire mais les ânes nous l'ont montré : une fois sur le dos, ils ne s'agitaient pas, regardaient ce qui leur était arrivé avant de reprendre du mouvement voire même nous attendaient tranquillement !

A savoir aussi que le mois de septembre est la saison des guêpes et qu'un museau d'âne qui fouine en terre à la sortie d'un nid ça déménage : Quetsche en a fait l'expérience par 2 fois !

Sinon les paysages d'Ardèche sont superbes et à la limite du partage des eaux (Atlantique/Méditerranée) nous avons commencé à suivre de nouveaux courants pour descendre vers le sud-est.

Point de vue autochtones, les rencontres ont été plutôt frileuses sauf avec Lionel et Sylvie à Chambas des Molines (près de Dornas), 2 âniers qui ont développé un accueil tout a fait paysan.

Pour sortir d'Ardèche et descendre sur la vallée du Rhône nous avons emprunté une ancienne voie de chemin de fer reconvertie en chemin. Elle va de St Agrève à la Voulte sur Rhône par la vallée de L'Eyrieu : Superbe descente en pente douce.

entre La Voulte et Livron

Dans la vallée du Rhône, nous sommes passés par La Voulte sans emprunter de grands axes routiers. Si bien que nous avons traversé la civilisation et ses ponts sans être envahis par la circulation. Contraste de reliefs et de couleurs par rapport à l’Ardèche, Lozère et Cantal. Nous nous sommes retrouvés dans une agriculture céréalière et fruitière et une eau de robinet chlorée après un mois dans les montagnes, avec ses troupeaux et ses sources. Avantage certain : les fruits. Les ânes ont découverts les raisins, les pèches, les poires et se sont régalés…nous aussi !

 

Le 15 septembre :

...

Finalement cela nous a fait bizarre de voir apparaître la maison du mas de l'âne et d'arriver au terme de ce périple. Contents de pouvoir lâcher l'attention, que les ânes soient sains et saufs et en même temps difficile de rompre avec la vie que nous avons vécu tous les 6 depuis 6 mois.

Les ânes sont arrivés limites au niveau usure des talons car nous ne nous attendions pas à faire autant de goudron dans cette dernière étape.

Heureusement une semaine après notre arrivée, nous avions une prestation d'une semaine avec un groupe d'adolescents autistes pour enchaîner. Enfin tout le monde, ânes et humains, retrouvaient ce à quoi ils étaient habitués !

 

BILAN : s’il est possible d’en arrêter un !

En chiffre : 6 mois, 750 km à pied sur 73 jours de marche, 250 km en bétaillère…

Finalement ce n'est pas une grande épreuve de traverser la France cela reste un pays sur-civilisé ! Le plus dur aura été de gérer les épreuves pour ces 4 jeunes ânes qui n'avaient rien demandé et qui ne s'attendaient pas à autant de surprises ! Ce qui a fait l'aventure pour nous ce ne sont pas les km et la marche à pied mais d'apprendre à rebondir sur les imprévus pour toujours jongler de manière positive, d’apprendre à ne rien attendre, rien imaginer de ce qui va être demain pour savoir recevoir.

 

Merci au Ciel d'avoir toujours été clément, nous ne nous sommes quasiment jamais pris d'eau en marchant, les orages ont toujours cogné lors de nos pauses.

Merci à la Terre pour sa beauté… dommage que l'agriculture soit devenue une exploitation à trop grande échelle pour l'Homme…

Merci à ceux qui restent Humain et à ceux qui ont pour devenir d'Etre Humain…


 

RANDONNEE LIBRE

2ème étape

Du samedi 30 juillet au 28 aout 2005

Après avoir passé l'hiver au chaud de l'Ardèche dans une ferme qui nous a accueillie et appris beucoup de choses, nous sommes repartis en juillet sur les chemins et routes en direction de l'Allier où nous attendait une "petite" ferme.

Ces 25 jours de marches pour remonter la Lozère et la Haute Loire ont conclu un périple fort d'expériences et de ressentis. Le rythme de la marche est une bonne conduite de vie...

Ne jamais rien prévoir quand on est en randonnée c'est peut être la leçon que nous retiendrons le plus...

Itinéraire :

Chanéac... Le Mezenc... Freycenet... Alleyrac... Le lac du Bouchet... Le pont d'Alleyras... Saugues... Paulhac... Les Farges... Villeneuve d'Allier... Brioude...

la vie est un mouvement !

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